Une saison clé qui peine à décoller
Alors que les États-Unis traversent la période traditionnelle de forte activité dans le secteur immobilier, le marché reste étonnamment atone. Selon les dernières données, les signatures de contrats ont fortement reculé en avril, malgré une augmentation du nombre de biens disponibles. Ce paradoxe s’explique par un déséquilibre persistant entre les attentes des acheteurs et les exigences des vendeurs.
Les propriétaires semblent plus enclins à mettre leurs biens en vente, mais les prix restent élevés et peu négociables. De leur côté, les acheteurs se montrent exigeants et hésitants, freinés par des conditions de financement peu favorables.
Des taux hypothécaires stables… mais trop élevés
Les taux hypothécaires sont restés relativement stables depuis le début de l’année, oscillant entre 6,8 % et 7 %. En théorie, cette stabilité pourrait rassurer les acheteurs, leur permettant d’anticiper les coûts d’emprunt. En réalité, ces taux élevés rendent l’accession à la propriété inaccessible pour de nombreux ménages.
Résultat : de potentiels acheteurs préfèrent louer des logements plus spacieux, car ils ne peuvent pas se permettre d’acheter à ces conditions. « Ce printemps, on a ressenti une sorte de démarrage avorté », résume Hannah Jones, analyste principale chez Realtor.com. Elle souligne que les prix élevés, les taux d’intérêt élevés et l’incertitude économique se conjuguent pour ralentir le marché.
Un rebond peu probable sans baisse des taux
Difficile de prédire quand et comment le marché retrouvera sa vitalité. Une baisse significative des taux d’intérêt stimulerait sans doute l’activité, mais un retour aux niveaux de 3 % ou 4 % semble peu probable à court terme, sauf en cas de récession majeure. Or, une récession impliquerait d’autres conséquences négatives : hausse du chômage, baisse de la demande et augmentation des défauts de paiement.
Une crise qui s’aggrave pour les constructeurs
La situation empire du côté de la construction. En mai, les mises en chantier ont atteint leur plus bas niveau en cinq ans, tout comme la délivrance de permis de construire – un indicateur clé de l’envie de bâtir. En juin, le moral des constructeurs est tombé à son niveau le plus bas depuis 2022. Le géant de la construction Lennar a d’ailleurs annoncé des résultats trimestriels inférieurs aux attentes, en raison de la faiblesse du marché.
Facteurs politiques et économiques aggravants
Le secteur est désormais confronté à des défis supplémentaires hérités de l’ère Trump : les politiques migratoires plus strictes et les droits de douane pèsent lourdement. L’industrie de la construction dépend fortement de la main-d’œuvre immigrée, de plus en plus menacée par les expulsions. En parallèle, les tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium ont doublé, atteignant 50 %, sauf pour les importations britanniques. De nouvelles hausses sont envisagées sur le bois, notamment le bois de charpente.
Selon Stuart Miller, co-PDG de Lennar, « la construction ralentit car les promoteurs réduisent leur production ». En juin, les mises en chantier ont chuté de près de 10 %, atteignant un rythme annualisé de 1,3 million de logements, bien en deçà des prévisions. Les permis pour les maisons individuelles ont également reculé, tombant à 898 000 unités, soit une baisse de près de 3 % par rapport à avril.
Une équation difficile à résoudre
En résumé, la demande en baisse se confronte à des coûts de construction toujours plus élevés, liés à la main-d’œuvre, aux matériaux et à l’incertitude économique. « Les acheteurs se retirent progressivement du marché en raison des taux hypothécaires élevés, de l’impact des droits de douane et de l’instabilité économique », confirme Buddy Hughes, promoteur en Caroline du Nord et président de l’Association nationale des constructeurs de logements.