La réouverture des marchés financiers en Indonésie, après une longue pause liée aux fêtes nationales, a été marquée par un net repli. Ce mardi matin, la Bourse de Jakarta a connu une baisse brutale de 9 %, entraînant une suspension temporaire des échanges. Parallèlement, la roupie indonésienne s’est effondrée de 1,8 % face au dollar américain, atteignant son plus bas niveau historique, un seuil jamais vu même lors de la crise financière asiatique.
L’indice de référence, le Jakarta Composite Index (JKSE), a chuté de 9,2 % lors des premiers échanges, atteignant son niveau le plus bas depuis juin 2021. À la reprise des transactions, après une suspension de 30 minutes, l’indice a récupéré une partie de ses pertes, limitant la baisse à environ 8,5 % vers 03h10 GMT.
Selon les données fournies par LSEG, la devise nationale a plongé jusqu’à 16 850 roupies pour un dollar, brisant le précédent plancher historique enregistré durant la crise asiatique de la fin des années 1990.
Face à cette situation critique, Bank Indonesia a réaffirmé son intention d’intervenir de manière « agressive » sur le marché des changes, tant au comptant que sur les contrats à terme non livrables (NDF), domestiques comme offshore. L’institution se mobilise également sur le marché obligataire pour stabiliser la monnaie nationale. « Nous allons continuer à agir pour équilibrer l’offre et la demande de devises et préserver la confiance des investisseurs », a déclaré Fitra Jusdiman, représentant de la banque centrale.
Afin de limiter la volatilité, la Bourse d’Indonésie a revu ses mécanismes de sécurité. Désormais, toute action dont le cours chute de 15 % se verra automatiquement refuser de nouvelles ventes, contre une fourchette de 20 à 35 % auparavant. De plus, une baisse de 8 % de l’indice principal entraînera une suspension de 30 minutes des échanges, contre 5 % auparavant. Si les pertes atteignent 15 %, une nouvelle pause de 30 minutes sera appliquée. Au-delà de 20 %, la suspension sera prolongée jusqu’à la fin de la journée boursière.
Le directeur général de la Bourse de Jakarta, Iman Rachman, a précisé lors d’une conférence de presse que ces ajustements visent à protéger les investisseurs. « Nous ne voulons pas provoquer de panique, mais plutôt rassurer les acteurs nationaux et étrangers sur notre capacité à garantir un environnement de transaction stable, surtout après une semaine d’inactivité », a-t-il affirmé.
Jeffrey Hendrik, autre cadre dirigeant du marché boursier indonésien, a indiqué que ces mesures pourraient être révisées une fois la situation stabilisée.
Pour Oktavianus Audi, vice-président de la stratégie chez Kiwoom Sekuritas, ces règles d’auto-rejet pourraient apporter un soutien temporaire à la Bourse. Cependant, il insiste sur le fait que les causes réelles de la chute sont d’ordre macroéconomique, notamment liées à l’instabilité globale provoquée par la politique commerciale des États-Unis. « La pression sur les marchés provient avant tout des décisions sur les droits de douane, en particulier celles de l’ancien président Trump », a-t-il déclaré.
Il appelle à une réaction stratégique du gouvernement pour renforcer la stabilité de la roupie, maintenir une croissance économique au-dessus de 5 % et défendre les excédents commerciaux du pays.
Les marchés indonésiens rouvraient ce mardi pour la première fois depuis le 27 mars, date de leur fermeture pour congés. Ils réagissent avec retard aux annonces américaines de la semaine dernière concernant l’imposition de droits de douane de 32 % sur certains produits indonésiens.
Face à ces mesures, le gouvernement de Jakarta ne souhaite pas riposter frontalement. Au contraire, il privilégie la voie diplomatique et prévoit d’envoyer une délégation de haut niveau à Washington pour négocier un accord, incluant un engagement à augmenter ses importations de produits américains.